Wiki com animation
Pages ayant un lien vers la page courante :
ArBres

Extrait de "Le livre des arbres, arbustes & arbrisseau", P. Lieutgaghi, Actes Sud

Châtaignier

... Fleurs : juin-juillet ; fruits : octobre.
Le genre compte une dizaine d'espèces dans les régions tempérées de l'hémisphère nord.
Port
Le Châtaignier, s'il prend, en massif, un tronc droit et un port voisin de celui du Chêne pédonculé, reste trapu à l'état isolé ou en plantations fruitières claires ("châtaigneraies" : Cévennes, Maures, Corse), et sa cime s'étale alors très largement sur un tronc court et gros. Dans le jeune âge, il pousse très vigoureusement et sa croissance peut se soutenir jusqu'à 50 ou 60 ans. Cette aptitude, jointe à celle de rejeter fort allégrement de souche en a fait, dans beaucoup de contrées, l'élément essentiel de taillis dont les usages seront étudiés plus loin.
Longévité
Prodigieuse : avec l'âge, son tronc peut atteindre des dimensions colossales qui en font le géant des feuillus de nos climats. Le Châtaignier de l'Etna, en Sicile, est sans doute le plus célèbre : dit "des Cent Chevaux" parce que, selon la tradition locale, cent cavaliers pouvaient s'abriter sous ses branches, cet arbre, en 1872, mesurait 56 m de tour à la base sur 20 m de hauteur. A la fin du XVlIIe siècle, époque où le peintre graveur Jean Houel (1735-1813) en fit une planche pour son Voyage pittoresque des isles de Sicile, de Malte et de Lipari (t. 2, p. 79, tabl. 114), on lui donnait déjà plus de 3 000 ans. Il était alors complètement creux (comme la plupart des vieux Châtaigniers, dont un champignon digère totalement le bois ; l'arbre continue cependant de se développer normalement puisque l'assise cambiale et l'aubier restent intacts, mais sa résistance au vent diminue beaucoup) et les gens du pays avaient construit, dans son tronc, une maison comportant une claie à sécher les châtaignes. Houel assure que, contrairement à la supposition de divers auteurs, ce Chataignier gigantesque n'était pas formé de la réunion de plusieurs troncs, qu'il s'agissait bien d'un seul arbre. Il existe, en Sicile, d'autres Châtaigniers très anciens dont l'un, également sur l'Etna, mesurait 18 m de circonférence en 1877.
A Madère croissait aussi un châtaignier vénérable dont Ch. Joly (2*) a donné deux planches à la fin du XIXe siècle : atteignant près de 12 m de tour à 1 m du sol, cet arbre de très haute taille (50 m selon Joly) renfermait, à la base, une chambre avec porte et fenêtre. La France possède aussi quelques Châtaigniers remarquables : celui du Plessix entre Rennes et Montfort, dans l'Ille-et-Vilaine, atteignait 28 m de circonférence, celui de Sancerre, mesurait 18 m de tour à la base, en 1892 ; on le jugeait plus que millénaire (interrogé à son sujet, le Syndicat d'initiative, de Sancerre m'a dit l'ignorer). En Haute-Savoie, près de Thonon, le Châtaignier de Chavanne a 30 m de hauteur et 15 m de circonférence ; près d'Evian, celui de Neuve-Celle mesure 25 m sur 14 m, etc. Quoique la plupart de ces arbres colossaux croissent dans l'Europe méridionale, leur patrie originelle, on en connaît de fort beaux sujets en Angleterre, tel le Châtaignier de Tortworth, dans le comté de Gloucester qui, déjà appelé "the great Chestnut" en 1135, avait près de l6 m de tour en 1830.

Origines
Le Châtaignier est-il spontané en France ? Ce problème a fait couler beaucoup d'encre et les auteurs modernes sont encore en désaccord à son sujet. La récente Flora europaea (t. l, p. 6l, 1964) le présente comme une essence introduite dans notre pays, tout en admettant la possibilité de son indigénat en Corse, tandis que R. Roi (1962) écrit qu'il "paraît spontané en Corse, dans le massif des Maures et dans les Cévennes méridionales". Il n'est pas douteux que cet arbre ait été introduit par l'homme dans les régions septentrionales qu'il occupe actuellement, jusqu'au sud-est de l'Angleterre et au Danemark et que, en dehors de la région méditerranéenne, en France, il ne croisse, hormis les nombreux peuplements artificiels, qu'à l'état naturalisé, mais quelques données paléontologiques semblent prouver sa persistance, ou du moins plusieurs avancées de ses troupes dans notre pays pendant l'ère quaternaire. Connu dans le miocène supérieur de l'Ardèche (Flore du mont Charraix), où ses vestiges (ou du moins ceux d'un ancêtre voisin) accompagnent ceux du Bouleau, du Charme, du Hêtre, du Cèdre et du Platane, ces deux derniers genres aujourd'hui exotiques, présent au pliocène, le Châtaignier est représenté au taux de 2 % sur les 750 grains de pollen, appartenant à 36 genres différents, reconnus par Cl. Sittler dans un échantillon des lignites de La Raza (nord-est de Bourg-en-Bresse), que F. Bourdier (/.c., t. l, p. 239), place tout à fait à la base du Quaternaire, au Proto-Villafranchien. Notre arbre abandonne encore des pollens dans les alluvions anciennes de Mont-Fleury, près de Genève, que certains auteurs datent de l'interglaciaire Riss-Würm, d'autres du Mindel-Riss. Puis une grande lacune jusqu'à la fin de la dernière glaciation (Würm) : des charbons trouvés dans une grotte magdalénienne de la Dordogne, étudiés par P. Fliche en 1907, sont attribués "sans ambiguïté à des racines de l'espèce actuelle" par ce dendrologue réputé*. Plus près de nous, à Saint-Etienne-en-Dévoluy, au nord-ouest de Gap, des tourbes, considérées comme appartenant au niveau de la chênaie mixte (de - 5 000 à - 2 500 environ), ont livré à J. Becker des pollens de Châtaignier, en nombre bien faible, à vrai dire : 2 grains sur 84 d'espèces ligneuses. Le Châtaignier a également été cité dans une cité lacustre du premier âge du fer, au lac du Bourget.
Ces quelques données permettent de croire à la persistance du Châtaignier sur les bords de la Méditerranée pendant les plus mauvaises périodes du Quaternaire. De là, il pouvait repartir vers le nord pendant les interglaciaires, bien que les grandes régions calcaires du Sud-Est dussent nécessairement limiter son extension (la stricte localisation du Châtaignier sur la silice peut d'ailleurs expliquer l'absence de ses empreintes dans les tufs quaternaires, dépôts de sources des terrains calcaires où les restes de plantes calcifuges sont toujours fort rares). Si la détermination de Fliche est exacte, et il y a tout lieu de le croire, l'indigénat du Châtaignier est très probable : passé le Paléolithique supérieur, les variations climatiques n'auraient sans doute pas atteint des excès suffisants vers le froid pour chasser l'arbre de nos contrées les plus méridionales, où le Micocoulier, l'Arbre de Judée, l'Arbousier et tant d'autres ont bien subsisté. On peut affirmer, en tout cas, qu'il n'a pas été introduit d'Asie Mineure au Ve siècle avant J.-C., comme l'écrit P. Fournier dans ses Quatre Flores.
Aujourd'hui, le Châtaignier occupe, soit spontané, soit cultivé, une aire très vaste qui va du Portugal à la mer Caspienne, englobant tous les pays côtiers du nord de la Méditerranée et, au sud, l'Afrique du Nord. La culture la répandu jusqu'au Danemark. En France, il couvre environ 500 000 ha, superficie qui place notre pays au second rang en Europe, derrière l'Italie (800 000 ha ; plus de 15 % de la surface boisee) et devant l'Espagne (110 000ha).
Stations et distribution
Le Châtaignier, essence calcifuge, aime les sols profonds, frais, perméables, sur granites, schistes, sables, grès, etc. (là où prospèrent la Fougère Aigle, la Callune, le Genêt à balai, le Chêne-Liège, etc.). Sa distribution actuelle dans notre pays est ainsi non seulement liée au climat (on ne le trouve ni dans le Nord ni dans l'Est, sauf sur le versant alsacien des Vosges jusqu'à 720 m) mais surtout à la composition chimique du sol : on le rencontre dans tous les massifs siliceux anciens : Massif armoricain, Massif central et abords, Pyrénées, Cévennes, Maures et Estérel, Corse.
Il ne s'élève pas beaucoup en altitude : l 200 m en Corse ; rarement au-dessus de l 000 m dans les Alpes et les Pyrénées ; 950 m dans les Cévennes. Dans la région de Paris,
il forme très souvent des taillis sur les affleurements sableux ou gréseux, taillis aujourd'hui bien délaissés où de vieilles cépées fructifient, faisant le bonheur des promeneurs dominicaux, en octobre.

USAGES DU CHÂTAIGNIER
Propriétés médicinales
L'écorce et le bois du Châtaignier, ainsi que la pelure des fruits, renferment une proportion importante de tanin et leurs propriétés, qui dérivent toutes de l'astringence, sont très voisines de celles du Chêne auquel on se reportera pour de plus amples détails. Matthioli, au XVIe siècle, recommandait les châtaignes sèches dans les diarrhées et l'hémoptysie, pilées avec de l'Orge et du vinaigre en cataplasmes centre l'engorgement des seins, avec du sel et du miel contre les morsures de chiens enragés. Au XVIIe siècle, leur farine malaxée avec du miel et de la fleur de soufre "fournit un électuaire propre à ceux qui crachent le sang et qui toussent beaucoup". Leur seconde peau "arrête puissamment les flux de ventre excessifs et de sang, prise dans su vin austere" (Nicolas Alexandre) et, mêlée à partie égale d'ivoire rapé, on la dit excellente contre la leucorrhée. Grelet (1807) a conseillé, dans la dysenterie, de manger des châtaignes non débarrassées de cette peau. Les feuilles du Châtaignier s'utilisent, aux Etats-Unis, dans la toux et la bronchite, en infusion à 5 % ; les chatons sèches auraient des vertus antidiarrhéiques prononcées (Fournier). Ici, toutefois, les propriétés médicinales sont éclipsees par celles, économiques, des fruits.

LA CHÂTAIGNE
Qualités alimentaires
Nous vivons un temps de vaches grasses : devenue la parfaite complice de la dinde de Noël, "marron glacé sous une robe de sucre, ou, plus humblement, la petite boule brûlante, hirondelle d'hiver (ainsi l'appelaiit-on autrefois) que le passant pressé achète autant pour tromper l'attente du prochain dîner que pour se réchauffer les doigts...
Une civilisation du Châtaignier
Avant l'introduction de la Pomme de terre, la châtaigne était la ressource alimentaire essentielle des pays siliceux pauvres du sud de la France, de la Corse, de l'Italie, etc., tenait parfois lieu de pain et souvent de viande. L'arbre et son fruit furent, ça et là, le cœur de groupes humains qui en dépendaient aussi étroitement que les Esquimaux sont liés à l'existence du phoque et tant de techniques, de pratiques paysannes et domestiques, de traditions y sont associées, qu'il est permis de parler d'une vraie civilisation du Châtaignier. Dans le Limousin, dans les Cévennes, la châtaigne ne fut jamais la seule nourriture, mais, une grande partie de l'année, les pauvres ne connaissaient guère d'autres mets : "La châtaigne, écrit encore Parmentier (7), présente de grands avantages aux Limousins. Leur sol froid et stérile ne pourrait fournir suffisamment de grains Pour leur subsistance annuelle ; ce fruit y supplée. C'est un besoin pour eux et les habitants des campagnes attendent avec impatience le moment où ils vont jouir de ce bienfait. Ils préfèrent cet aliment à tous les autres ; il est souvent le seul qu'ils peuvent se procurer pendant six mois de l'année...
comparatif banque

meilleures banques

Il n'y a pas de commentaire sur cette page. [Afficher commentaires/formulaire]